A Wife’s Credentials [Pilote – Corée]

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Étant sériephile, je suis plutôt habitué aux coups de cœur. Je les recherche, et cette traque fait partie inhérente de ma passion. Des coups de cœur, j’en ai eu plein cette année (on en reparlera lors de mon bilan), mais rares sont les fictions qui arrivent à vous toucher parce qu’elles répondent presque intégralement à votre cahier des charges. A Wife’s Credentials n’est pas un coup de cœur. Non, c’est le drama coréen que j’attendais désespérément depuis 2006 (Alone in Love). Rien que ça. Un bijou d’humanité, de réalisme, sans emphase, diffusé de Février à Avril 2012 sur la nouvelle chaîne du câble coréen JTBC.

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Voilà enfin une fiction mature qui s’applique à dépeindre les travers de la société coréenne, un peu à la façon de certains KBS Drama Special, sans distance, mais sans sensiblerie excessive. Notre héroïne est une femme mariée, Yoon Seo Rae (Kim Hee Ae), qui a élevé son enfant malade autant qu’elle le pouvait, l’éduquant elle-même sans faire appel à des écoles privées, préférant le protéger de la compétition scolaire, car il semble bien en retard. Qu’importe ! Pour elle, le bonheur et l’épanouissement de son enfant est bien plus important. Après bien des années d’efforts et de traitements, le fiston Han Gyeol semble enfin moins fragile, et peut même commencer le sport.

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Son père, Han Sang Jin (Jang Hyun Sung),  ne supporte plus cette situation. Sa nièce est particulièrement brillante dans les études, et ses propres parents ne veulent pas d’un petit-fils sans réussite. il persuade alors sa femme Yoon Seo Rae de s’installer dans un nouveau quartier huppé, avec de meilleures écoles, où sa mère est susceptible de les aider (ce qui s’avérera on ne peut plus faux, vu que celle-ci préfère jouer au go Stop sur son ordinateur plutôt que de recevoir sa belle-fille quelques instants – en quelques secondes le portrait est bouclé). Yoon Seo Rae accepte, à contrecœur, parce qu’il est toujours douloureux de se rendre compte que la vie ne fait pas de cadeaux. Avec la crise, on ne peut plus survivre sans accéder à des postes de plus en plus hauts. Et pour cela, il faut donc accéder à une meilleure éducation, au plus tôt. N’est ce pas déjà trop tard pour Han Gyeol ? Et surtout, la société lui laissera-t-elle encore une chance ?

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Le regard est sans complaisance pour le système éducatif coréen qui, sous prétexte de réussite scolaire, pousse les enfants très tôt à prendre des cours privés, avec des requis en terme de connaissance de plus en plus aberrants. La lutte est rude, et les regards de ces mères louves en dit long : il n’y aura pas de pitié. Lorsque Yoon Seo Rae essaye de s’acclimater elle est confrontée à la méchanceté, la lâcheté, et subit sans cesse des moqueries. Son fils n’a jamais fait le moindre examen dans sa vie, alors quand elle comprend qu’il va devoir en faire un pour peut-être rentrer dans un cours privé du soir, elle pense que ses propres capacités suffiront. Hélas. L’humiliation sera sévère. Faut-il alors ré-orienter son enfant dès maintenant vers le sport ou des carrières artistiques, parce que la compétition a déjà commencé bien plus tôt dans les autres matières ? Notre héroïne n’est pas dépourvue d’idées, heureusement. Elle essaye alors d’avoir accès à une excellente tutrice, elle-même directrice d’une école privée, et sa bonne foi, son innocence, sa gentillesse finiront bien par lui faire franchir tous ses obstacles. Pense-t-elle… sans savoir qu’elle même ne résistera pas à croquer la pomme.

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Yoon Seo Rae n’a pas une vie facile, mais le drama ne verse pas dans la larme facile. Son mari ne lui prête guère d’intérêt, et ne l’estime pas non plus. Sa mère souffre de la maladie d’Alzheimer et vit loin d’elle dans une maison de retraite (les scènes sont particulièrement touchantes dans le deuxième épisode). Et surtout, rien ne la destinait … à tomber amoureuse du dentiste (marié !) de son fils (Lee Sung Jae).

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La romance reste en effet le sujet phare de cette fiction, et elle est traitée avec suffisamment d’habileté et de maturité pour qu’on en comprenne les tourments. C’est l’adultère qui se cache derrière cette histoire d’amour. On sent cette irrésistible attirance, ce sentiment dangereux qui pénètre cette femme. Les baisers sont furtifs mais fougueux, et pour tout dire plutôt inattendus aussi tôt dans un drama coréen (si vous n’êtes pas convaincu, jetez vous sur le troisième épisode !).

La série déroge à tous les clichés, se veut à la fois plus âpre, plus sobre dans le traitement de l’émotion, ce qui a pour résultat – paradoxalement – de nous impliquer encore plus dans le propos. J’ai toujours eu un très net penchant pour les human drama, et A Wife’s Credentials rappelle par moment certains dramas japonais, voire même les dramas coréens des années 90. Un retour aux sources ?

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Nous ne sommes pas dans une réalisation qui recherche les regards, multiplie les angles de vue, et cherche à faire sortir l’émotion dans tous les plans comme dans April Snow (qui décrivait déjà avec une immense justesse une passion interdite). Et pourtant par moments tous les sentiments transparaissent magnifiquement à l’écran. Le drama opte aussi pour une musicalité parfois décalée. Si on peut comprendre le choix de certaines chansons anglo-saxonnes, j’ai eu parfois l’impression d’un décalage entre l’émotion ressentie et l’émotion véhiculée. Disons le tout net, ce sont des choix qui me correspondent moins. J’aurai préféré un thème orchestral sublimant certaines scènes (et cela se corrigera de plus en plus heureusement). Mais le drama utilise parfaitement le silence, intensifiant encore plus la plongée dans ce monde réel.

Résumer l’histoire à une romance mature dans un contexte social particulier ne serait pas rendre justice au drama. On sent en effet que quelques révélations sont à venir, et que malgré les rebondissements imputés au genre, le drama arrivera à se maîtriser pour faire fusionner human drama et makjang. La question de la fidélité, de la double vie y est par exemple traitée avec de multiples personnages…

Que dire de plus si ce n’est que le drama est à voir absolument…

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6 réflexions sur “A Wife’s Credentials [Pilote – Corée]

  1. Bien tenté de découvrir cette fiction ! 🙂
    La façon dont tu la décris me rappelle curieusement une autre au ton plutôt âpre également, très adulte et traitant de l’adultère puis par extension du divorce, c’était La Dolce Vita. http://wiki.d-addicts.com/Bittersweet_Life

    D’ailleurs j’y avais ressenti une approche human drama se rapprochant des fictions japonaises comme tu l’as souligné et les premiers épisodes de la série proposant justement une excursion dans les montagnes nippones enneigées, ce qui conférait d’emblée un cadre remarquable et saisissant, presque cinématographique.

    Vraiment un très grand cru et passé trop inaperçu à mes yeux. Lorsque des fictions coréennes sont sobres et maîtrisées, elles font littéralement merveille même si les joyaux se font plutôt rares. Bien pour ça qu’il faut encore plus les plébiscités !

  2. Merci ! Ça me fait plaisir de te lire.
    Je n’ai pas vu Bittersweet life. Ce que tu en dis est alléchant, vu que c’est une fiction qui diffère du ton habituel de MBC. Je note précieusement ta recommandation.
    Comme tu dis les vrais joyaux sobres et maîtrisés se font de plus en plus rares. Mais j’ai grand espoir depuis la multiplication des chaînes câblées. JTBC et TVN notamment ont vraiment trouvé leur ton cette année. On en reparle au bilan.

  3. Merci pour cette critique en français (en général je trouve des articles en anglais) Je l’ai trouvée juste, je prends en note Bittersweet Life et Alone in Love et April Snow 🙂

    ça fait des mois et des mois que je suis cette série…c’est une honte qu’une seule personne se soit retrouvée à sous-titrer cette série! Je prends mon mal en patience et je salue la persévérance de cette personne. Cette série est excellente.

    J’en suis au 12ème épisode, et toi?

    • Merci pour ton commentaire ! Ça fait plaisir également de voir que le drama n’est pas passé totalement inaperçu ! C’est la pépite de cette année 2012. Mon visionnage est arrêté à cause du sous-titrage, tout comme toi 😉 Dur d’attendre la suite !

  4. J’avais lu des reviews très enthousiastes lors de la diffusion, et puis la tienne a été le déclic : j’ai placé A Wife’s Credentials dans mes rattrapages à venir en Corée du Sud. Je viens de voir le pilote. Un vrai bonheur, et un grand grand merci !
    Toute ta critique est très juste. J’aime vraiment quand ces fictions prennent le temps de porter un regard sur la société sud-coréenne actuelle, l’éducatif, l’arrondissement de Gangnam à Seoul, etc… J’ai vraiment beaucoup aimé ! Cette année je pense plus recentrer mes visionnages en Corée du Sud sur ce type de dramas, qui sonnent justes et authentiques, avec une dimension plus sociale, quitte à privilégier les rattrapages. Merci pour cette chouette découverte. 😉

    • De rien pour la découverte, je suis heureux que la fiction te plaise. Comme je l’ai dit ça faisait longtemps que j’avais pas eu une claque de cette envergure devant un drama coréen. Et je croise les doigts pour que ce petit bijou rejoigne Alone in love dans mes fictions préférées. (Ouf, le sous-titrage est terminé, je vais pouvoir reprendre !).
      J’attends beaucoup du prochain drama du même auteur, End of the World, prévu pour le mois prochain. Le ton sera évidemment complètement différent, mais le sujet est pour le moins original, et c’est diffusé sur jTBC ce qui ne gâche rien. Le seul problème, ça sera d’attendre les sous-titres !

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