Double Face est une mini-série japonaise pour le moins ambitieuse qui s’en sort avec les honneurs. Non seulement l’histoire s’attaque à l’un des meilleurs polars de Hong Kong (Infernal Affairs), mais en plus il s’agit d’une collaboration inédite entre deux chaînes concurrentes. Ainsi TBS a diffusé la première partie (Sennyuu Sosa Hen), et WOW s’est chargé de la seconde (Giso Keisatsu Hen). On n’ose pas imaginer de tels procédés à la télévision française.
L’avantage de se réunir autour d’une superproduction, c’est que les moyens alloués sont conséquents. Et cela se voit. Étant un grand fan de la trilogie Infernal Affairs, évidemment, les multiples comparaisons me semblaient obligatoires. Le film était une réussite incontestable, avec un scénario parfaitement huilé et des acteurs magnifiques (Tony Leung et Andy Lau). Ne me parlez pas du remake américain avec Di Caprio, j’en ai encore des boutons. Double Face n’a pas changé grand chose à la vision d’Alan Mak et Andrew Lau, il s’agit d’une adaptation au media télé pour le moins indolore.
J’avais mes inquiétudes avec une histoire coupée en deux, où nos protagonistes prennent tour à tour la lumière. Il n’en est rien. Tous les mécanismes de ce thriller ont été conservés, sans raccourcis, sans subterfuges. On retrouve donc avec bonheur tous les évènements-clés. Passer à 3h de fiction télévisuelle était un défi de taille. Qu’allait-on nous rajouter ? En fait Double Face a pris avantage de son support, en prenant son temps notamment en seconde partie pour détailler la vie « familiale » d’un des protagonistes, et utilisé quelques flashbacks pour rappeler au téléspectateur ce qu’il en était. Contrairement au film, la série met vraiment l’accent sur la solitude, sur les difficultés de vivre avec un tel secret, plutôt que d’expliciter le passé des protagonistes. Et l’émotion est au rendez-vous. La série n’hésite pas non plus à donner dans la symbolique avec un chien abandonné (une taupe chez nous, est un « chien » chez eux), ou avec un ascenseur – qui descend inexorablement vers l’enfer.
Je n’ai au fond qu’un grand reproche à faire à Double Face : l’envergure. Les comédiens (Teruyuki Kagawa, Antarctica et Hidetoshi Nishijiwa, Dolls) s’en sortent bien (même si j’ai trouvé la prestation de notre Densha Otoko un peu limitée). Mais ils n’ont pas le charisme de Tony Leung ou d’Andy Lau. Les scènes sont efficaces, irréprochables, maîtrisées mais il manque un côté spectaculaire pour accroître le côté dramatique. Il manque un chouïa de nervosité, de paranoïa… Et cela se ressent notamment avec une bande-son parfois trop discrète, et certains thèmes mal placés. Pour un téléspectateur n’ayant jamais vu Infernal Affairs, par contre, il risque d’être scotché sur son siège, parce que le scénario – millimétré – reste redoutable. (A se demander comment le duo Alan Mak/Andrew Lau a pu se rater sur Confession of Pain).
Rappelons donc le sujet. Un flic infiltré depuis 6 ans chez les Yakuzas. Un yakuza infiltré dans la police. Tous les deux assument de plus en plus mal leurs doubles identités. Et chacun va essayer d’accomplir sa mission, tout en ayant conscience qu’une taupe existe également dans l’autre camp. En dire plus serait évidemment préjudiciable. Sachez que l’histoire a son lot de rebondissements et que la fin est osée. Bref, Double Face fait désormais partie des incontournables pour les amateurs de télé nippone.
J’ai pris ce remake comme un hommage au film, et je me suis surpris à rêver d’une adaptation des autres volets de la trilogie… Il y a de la matière. TBS et WOW, merci. On vous attend.