La telenovela fait désormais son entrée dans les foyers anglophones aux USA. Devious Maids est une adaptation de la telenovela méxicaine Ellas son la Alegria del Hogar, et il était plutôt logique d’y retrouver le créateur de Desperate Housewives, Marc Cherry.
A défaut d’une vraie télénovela, Marc Cherry va s’employer à coller sa recette de soap humoristique, avec tout le talent qu’on lui connait (ou qu’on veut bien lui reconnaître). Les répliques font mouche, l’acidité du propos (la lutte des classes) n’épargne personne, on y saupoudre un peu de mystère, bref on est en terrain connu. A tel point qu’on pourrait se demander si cela vaut le coup de voir une série a priori aussi peu inventive..
Eh bien oui. Car là où Desperate Housewives en faisait des tonnes sur l’émotion, avec ses mystères ridicules et ses drames faussement larmoyants, Devious Maids prend le parti du second degré et ne le lâche quasiment jamais. La preuve que Marc Cherry a enfin compris comment rendre une série plus drôle, plus rythmée, plus sympathique : il n’y a plus de voix off qui rend l’histoire si prévisible. Juste quelques notes de musiques latines pour renforcer le côté décalé et insuffler davantage d’énergie à des intrigues ridicules.
Une farce. On s’amuse de l’égoïsme sans limites de ces maîtresses de maison, de l’ambition cachée des servantes, et de cette guerre des égos qui ne dit pas son nom. Revers de la médaille : on se désintéresse complètement des personnages encore un peu trop génériques.
Et l’histoire alors ? Elle raconte comment une femme apparemment cultivée postule pour un poste de servante quelques semaines après le meurtre de l’une d’elles. On se doute bien entendu de ses motivations, et la scène finale n’a rien de choquant, mais le principe est respecté à la lettre et rappellera fortement Gran Hotel. Mais toutes les servantes de la série n’ont pas de secret aussi dramatique (et mystérieux) : il peut s’agir d’une histoire d’amour, d’une envie de profiter des contacts de son patron pour percer dans la musique ou tout simplement de faire rapatrier son fils…
Clairement, l’histoire passe au second plan. Ce qui compte ce sont les piques, les vengeances de ces femmes qui ne sont qu’à peine reconnues par leurs patrons (ou alors pour de mauvaises raisons). Utilisées sans vergogne, rabaissées, déshumanisées, ces femmes ne vont pas se laisser faire. C’est ça, côtoyer le pouvoir, ça rend aussi fou qu’en avoir.
La série aurait pu se contenter de son casting ethnique de charme qui surjoue délicieusement (Ana Ortiz, Roselyn Sanchez, Dania Ramirez), mais du côté des patrons, il y a de quoi faire également avec un Tom Irwin qui adore cabotiner. On le comprend. Impossible de prendre au sérieux tout cela. Et cette remarque est tout sauf une critique. Cela fait du bien de voir des acteurs prendre plaisir de manière détachée.
J’avoue aussi ne pas comprendre les critiques qui pleuvent sur la série parce qu’elle donne un rôle caricatural aux hispaniques. Mais justement, c’est le but ! Tout l’intérêt du show est dans la caricature de deux mondes opposés, ethniquement, financièrement… mais pas moralement.
Devious Maids n’est pas une brillante réussite (la sensation de déjà vu est difficile à dissiper, les histoires sont tout sauf passionnantes), mais elle est drôle, rythmée, légère. On est loin des ragots pénibles de GCB (souvenez-vous !). La série de Lifetime (eh oui !) est bien partie pour m’occuper agréablement cet été. J’espère juste que Marc Cherry restera fidèle à ce pilote.