Décidément JTBC est de loin ma chaîne coréenne préférée. Je désespérais de trouver un polar haletant, complexe, mature, et Heartless City est le joyau que j’attendais. Rien que ça.
Et pourtant c’était mal parti. La fiction commence par nous présenter l’habituel combat d’une brigade de police contre un cartel de drogue. Mais au lieu de se focaliser sur cet aspect, les deux premiers épisodes enchaînent les surprises, et les personnages. Les informations données sont sommaires, et il appartient au téléspectateur de faire le lien entre chacune d’elles. On ne nous prend pas la main, ça surprend, surtout que ça va vite, très vite.
On a pas le temps de rêvasser. Après avoir nous avoir fait identifier le bad guy de l’histoire, le show multiplie avec délice les twists sur l’organisation criminelle. A un moment donné on frôle l’overdose, mais ça permet au récit de rester haletant. Pour autant, ça reste cohérent, ce ne sont pas de vulgaires pions qui se chevauchent inlassablement, c’est juste que le panorama qui nous est dressé est bien plus gigantesque que prévu. Le drama ne s’appelle pas Heartless City pour rien.
Ainsi du côté de la police, nous avons le chef d’équipe, Ji Hyung Min (Lee Jae Yoon, Ghost) qui après avoir tenté de devenir procureur (et ce, sous l’influence de son père), revient aux commandes avec pour ambition de « nettoyer » la ville de la drogue. On comprendra aisément ses motivations, puisque son frère est devenu un légume à la suite d’une overdose. Enfin, Ji Hyung Min a une petite amie policière qu’il veut à tout prix protéger (alors qu’elle se débrouille très bien toute seule jusque là)….
Aux commandes du cartel, « Scale » est impitoyable. Et tandis que la police se rapproche de lui, il va subir un coup d’état fomenté par Jung Shi Hyun (Jung Kyung Ho, Smile You), surnommé « Doctor’s son ». Mais Scale n’a pas dit son dernier mot… et de nouveaux personnages, tous liés à Jung Shi Hyun vont faire leur apparition. En dire plus serait un crime.
D’autant que le synopsis de la série spoile méchamment les épisodes suivants. On sent qu’à l’issue du second épisode, le drama en a encore largement sous le pied, et que les enjeux ne sont pas encore finalisés. Pour le moment la fiction se concentre exclusivement sur les twists policiers (et criminels), la romance est complètement absente.
Bien plus qu’un show policier comme Ghost qui s’appuie sur ses rebondissements, Heartless City joue la carte des liens entre les différents personnages, ce qui devrait facilement permettre de faire monter les enjeux. Trahisons, manipulations sont au programme et heureusement tout ce petit monde est malin et planificateur. Il n’y a pas de place pour un acte de vengeance isolé. Tout est froid, calculé, et cela participe grandement à la très bonne ambiance que distille la série.
La fiction est mature, chaîne câblée oblige. On devinera donc des ébats, des mains qui glissent le long des jambes, on nous montrera l’horreur de certaines situations, comme un homme qui vend son enfant en échange de doses de drogue. La vie nocturne n’a plus rien de glamour, avec ces fêtards qui tombent comme des mouches. Des innocents sont tués, et on prend le temps de voir leur vie s’écourter. Ils font partie de la fiction, même pour quelques minutes. Là, c’est sûr, Heartless City ne fait pas partie du dépliant touristique.
Rares sont les moments musicaux, d’ailleurs. Pas le temps pour ça. On passe d’une émotion à l’autre, d’une horreur à l’autre, on essaye vainement de comprendre ce qui se passe devant nos yeux et on échoue lamentablement à prévoir la suite. Et par moment, ça y est la musique résonne, redonnant toute sa place aux enjeux.
Ça fait donc plaisir de voir une fiction coréenne qui non content de travailler ses rebondissements, est capable d’inventer un monde complexe, brutal. Un monde que l’on prend plaisir à découvrir en même temps que l’on regarde ses multiples soubresauts. Le réalisateur ne s’attarde que rarement sur les visages. Les paysages sont quasiment absents. Seuls vivent – et survivent – des personnages dans une arène. Pas de place pour la poésie.
Il est sans doute trop tôt pour porter un jugement sur les enjeux de cette saga, mais je suis déjà conquis. Qui sait ? Avec un peu de chance, un peu plus dramaturgie et d’élans dans l’émotion (quand la fiction se posera), on retrouvera peut-être l’ambiance des superbes polars du cinéma coréen. Il manque encore une patte, un regard, mais tout le reste est là. En tous cas ça fait plaisir de voir la fiction coréenne se diversifier de plus en plus (Merci JTBC !)